Fin de la période de léthargie dans les
bureaux de la firme d’Hamamatsu : la ZX9R commençait à faire figure de
vieux tréteau, comparée aux missiles sol-sol ultra radicaux proposés
par la concurrence dans la catégorie des réplicas. Autant
dire que voir le fleuron de sa gamme qualifié de "routière sportive"
dans les comparatifs spécialisés a certainement poussé les bureaux
d’études de Kawasaki à nous proposer cette "Ninja" nouvelle génération.
Les temps changent, les motos aussi... La couleur de l’espoir Premier
contact avec la ZX-10R dans Paris. Le rédac' chef, qui a convoyé
l'engin depuis le site de l’importateur, me livre sa première
impression à chaud : "très impressionnant, mais plus facile que je pensais !"
Ah... Pourtant, elle à l’air franchement méchante, cette machine :
lignes agressives tendues sur l’avant, couleur inimitable des grands
jours de la marque à la limite du fluo, disques de frein ciselés
"marguerite", tubes de fourches traités noir, aspect spartiate... Tout
concours à la classer sans hésitation dans le clan des mustangs
indomptables... Sans parler
de ces morceaux de titane aux soudures brillantes, d’aluminium brossé,
de ces jantes pleines de vide et de ce poste de pilotage réduit à sa
plus simple expression... Rien qu’à détailler l’engin, on en a les
sliders qui râpent tous seuls de bonheur... Seule
concession visible : le système de contacteur à transpondeur qui ne
sera pas superflu, vu l’impossibilité chronique d’attacher la moto
efficacement. Il y a des choses auxquelles on ne veut vraiment pas
s’habituer ! Contact,
l’ampoule de code s’éteint seule, pour se remettre en fonction une fois
le moteur en service. Voilà qui ravira les aficionados de technologie,
même si au final, l’éclairage est un peu faible malgré le
fonctionnement simultané des deux ampoules en position plein phares. Jeannine la Ninja musarde en ville... Pas
le choix, il faut sortir de la ville... Rien que cette pensée fait
souffrir d'avance car la position est bien à l’image de la moto :
radicale. Les poignets sont douloureux en moins de 10 minutes, la
jonction entre la selle et le réservoir pince douloureusement
l’intérieur des cuisses lorsque les jambes se déplient au feu et la
circulation en ville devient vite un calvaire. Difficile toutefois de
critiquer ce point précis, alors que rien ne prédispose l'engin à un
tel exercice ! Ceci dit, le moteur ne semble pas surchauffer et la
maniabilité à basse vitesse est tout à fait convenable. Il ne faudra
pas espérer passer la seconde en ville, tant la première tire long.
Dommage, car l’embrayage à câble est doux et dosable. Et
puis au moins, l’opération "frime" prend une envergure non négligeable
: pas un motard qui ne détaille avidement le jouet au feu ! Forcément,
pour entamer la discussion, c’est facile. Et histoire de bien enfoncer
le clou, ladite discussion a souvent tendance à se terminer sur un gros
coup de gaz en première... Qui pourrait en effet résister à cette
tentation de bien montrer à quel point il est valorisant de rouler sur
ce bâton de dynamite ? Bon, mais sur nos routes à nous ? Précisons
d'emblée que la moto à l’essai est en version 100 cv, ce qui revient à
dire qu’elle offre à peine un peu plus de la moitié de son potentiel
moteur... Dès que l’espace se libère un peu devant, j’ose un bon run en
seconde : quelle allonge, et surtout quel coffre aux mi-régimes ! Les
bruits mécaniques des bas régimes s’estompent, laissant le champ libre
à la sonorité virile et rauque de l’échappement d’origine. Par contre,
forcément, juste à l’instant ou le moulin prend son souffle pour
attaquer la partie intéressante de la courbe de puissance, le bridage
se fait sentir, frustrant immanquablement le pilote. Mais au moins, le
moteur continue de monter en régime et ne s’arrête qu’en zone rouge.
Relative réussite donc qui ne pénalise pas trop la moto, sinon en
créant une sorte de zone neutre passé 8 500 tours/mn, dans laquelle on
perd un peu le feeling de la poignée de gaz. Le
témoin de changement de rapport s’illumine très faiblement pour
signaler qu’il est temps de passer une vitesse, bien qu’en seconde le
compteur affiche déjà une valeur strictement inavouable. C’est à ce
moment qu’on réalise combien le tableau de bord est raté : le
compte-tours bargraph est illisible, le shift-light est ridicule et de
toute façon, le bloc d’instrumentation est trop bas pour être consulté
sans quitter la route des yeux. Plutôt gênant sur un engin de ce
calibre. Bref,
pour en revenir à la boîte de vitesses, tout va bien en roulage
tranquille mais dès qu’il faut accélérer la cadence, j’ai un peu de mal
à enchaîner les rapports à la volée. Le sélecteur se fait très ferme
sous l’orteil et le timing poignée/sélecteur est assez difficile à
trouver. Incompréhensible, sauf à se demander si la boîte n’est
finalement pas optimisée pour une utilisation en version libre, ce qui
expliquerait la difficulté à trouver le dosage parfait dans la version
castrée... Les rapports sont néanmoins très rapprochés, ce qui couplé
au gros coffre a tendance à chambouler les repères de vitesse. Pour
le reste, la partie cycle est vraiment impressionnante de facilité et
de neutralité. Le réglage des suspensions téléphone parfaitement les
imperfections de la chaussée et procure un parfait compromis
rigueur/souplesse. La selle participe au confort de l’ensemble en
offrant également un bon amortissement. Mais attention, nous parlons
ici d’une sportive de l’extrême ! Il faut donc replacer ce commentaire
dans son contexte et adapter le terme "confort" à la catégorie. Et
surtout, quel rail : impossible de mettre quoi que ce soit en défaut
sur la partie cycle. Changements d’angle à haute vitesse, accélérations
au taquet, raccords de bitumes, prise de freins tardives et sur
l’angle, rien ne vient perturber la stabilité de la ZX-10R. Un regard,
et l’ensemble se place immédiatement sans aucune difficulté. Même le
gros Dunlop D 208 arrière de 190 ne semble pas affecter la maniabilité.
Le prix à payer - car il y’en
a un -, c’est cette sensation de toujours pouvoir faire plus vite, plus
fort, plus beau, qui pousse irrémédiablement à rouler beaucoup trop
vite sur la route. Un conseil : ne regardez jamais le compteur car il y
a vraiment moyen de se faire une énorme frayeur en réalisant à quelle
vitesse on se laisse embarquer... Seul
défaut relevé, une histoire de goûts : la poignée de frein ne présente
pas un retour d’informations à la hauteur du reste et l’attaque du
levier manque de mordant malgré la présence des étriers radiaux. Sur
une moto de cette trempe, pas de durit tressée ni de maître cylindre
radial représente encore une économie de bout de chandelle
incompréhensible. Mais tempérons, car comme n’importe quelle sportive
récente, elle freine fort. Quant à l'autonomie, elle est d’environ 180
km avant l’allumage du petit voyant de réserve. Classique pour la
catégorie. La tentation était trop forte ! Impossible
de résister, il faut vraiment aller tester les capacités du joujou sur
la piste. Direction le circuit Carole, dans des conditions climatiques
optimales. En prégrille, rebelote : les regards se fixent sur l’engin.
Grosse pression sur le pilote, qui va devoir être à la hauteur de sa
monture... Précisons
que je n’ai jamais roulé sur une moto pareille, plus habitué que je
suis aux 50 chevaux et à la partie cycle hors d’age du SZR monocylindre
du Team Moto-Net (lire notre dossier spécial).
Petite expérience de la piste, aucune de l’architecture moteur : les
meilleures conditions sont réunies pour juger de la facilité de prise
en main de l'engin ! Dès les
premiers tours, tout s’éclaire : mon mètre soixante-quinze s’intègre
parfaitement dans le triangle selle/repose-pieds/bracelets, le
réservoir reçoit l’appui de la jambe et du bras extérieurs et le
déhanché se fait naturellement.
bureaux de la firme d’Hamamatsu : la ZX9R commençait à faire figure de
vieux tréteau, comparée aux missiles sol-sol ultra radicaux proposés
par la concurrence dans la catégorie des réplicas. Autant
dire que voir le fleuron de sa gamme qualifié de "routière sportive"
dans les comparatifs spécialisés a certainement poussé les bureaux
d’études de Kawasaki à nous proposer cette "Ninja" nouvelle génération.
Les temps changent, les motos aussi... La couleur de l’espoir Premier
contact avec la ZX-10R dans Paris. Le rédac' chef, qui a convoyé
l'engin depuis le site de l’importateur, me livre sa première
impression à chaud : "très impressionnant, mais plus facile que je pensais !"
Ah... Pourtant, elle à l’air franchement méchante, cette machine :
lignes agressives tendues sur l’avant, couleur inimitable des grands
jours de la marque à la limite du fluo, disques de frein ciselés
"marguerite", tubes de fourches traités noir, aspect spartiate... Tout
concours à la classer sans hésitation dans le clan des mustangs
indomptables... Sans parler
de ces morceaux de titane aux soudures brillantes, d’aluminium brossé,
de ces jantes pleines de vide et de ce poste de pilotage réduit à sa
plus simple expression... Rien qu’à détailler l’engin, on en a les
sliders qui râpent tous seuls de bonheur... Seule
concession visible : le système de contacteur à transpondeur qui ne
sera pas superflu, vu l’impossibilité chronique d’attacher la moto
efficacement. Il y a des choses auxquelles on ne veut vraiment pas
s’habituer ! Contact,
l’ampoule de code s’éteint seule, pour se remettre en fonction une fois
le moteur en service. Voilà qui ravira les aficionados de technologie,
même si au final, l’éclairage est un peu faible malgré le
fonctionnement simultané des deux ampoules en position plein phares. Jeannine la Ninja musarde en ville... Pas
le choix, il faut sortir de la ville... Rien que cette pensée fait
souffrir d'avance car la position est bien à l’image de la moto :
radicale. Les poignets sont douloureux en moins de 10 minutes, la
jonction entre la selle et le réservoir pince douloureusement
l’intérieur des cuisses lorsque les jambes se déplient au feu et la
circulation en ville devient vite un calvaire. Difficile toutefois de
critiquer ce point précis, alors que rien ne prédispose l'engin à un
tel exercice ! Ceci dit, le moteur ne semble pas surchauffer et la
maniabilité à basse vitesse est tout à fait convenable. Il ne faudra
pas espérer passer la seconde en ville, tant la première tire long.
Dommage, car l’embrayage à câble est doux et dosable. Et
puis au moins, l’opération "frime" prend une envergure non négligeable
: pas un motard qui ne détaille avidement le jouet au feu ! Forcément,
pour entamer la discussion, c’est facile. Et histoire de bien enfoncer
le clou, ladite discussion a souvent tendance à se terminer sur un gros
coup de gaz en première... Qui pourrait en effet résister à cette
tentation de bien montrer à quel point il est valorisant de rouler sur
ce bâton de dynamite ? Bon, mais sur nos routes à nous ? Précisons
d'emblée que la moto à l’essai est en version 100 cv, ce qui revient à
dire qu’elle offre à peine un peu plus de la moitié de son potentiel
moteur... Dès que l’espace se libère un peu devant, j’ose un bon run en
seconde : quelle allonge, et surtout quel coffre aux mi-régimes ! Les
bruits mécaniques des bas régimes s’estompent, laissant le champ libre
à la sonorité virile et rauque de l’échappement d’origine. Par contre,
forcément, juste à l’instant ou le moulin prend son souffle pour
attaquer la partie intéressante de la courbe de puissance, le bridage
se fait sentir, frustrant immanquablement le pilote. Mais au moins, le
moteur continue de monter en régime et ne s’arrête qu’en zone rouge.
Relative réussite donc qui ne pénalise pas trop la moto, sinon en
créant une sorte de zone neutre passé 8 500 tours/mn, dans laquelle on
perd un peu le feeling de la poignée de gaz. Le
témoin de changement de rapport s’illumine très faiblement pour
signaler qu’il est temps de passer une vitesse, bien qu’en seconde le
compteur affiche déjà une valeur strictement inavouable. C’est à ce
moment qu’on réalise combien le tableau de bord est raté : le
compte-tours bargraph est illisible, le shift-light est ridicule et de
toute façon, le bloc d’instrumentation est trop bas pour être consulté
sans quitter la route des yeux. Plutôt gênant sur un engin de ce
calibre. Bref,
pour en revenir à la boîte de vitesses, tout va bien en roulage
tranquille mais dès qu’il faut accélérer la cadence, j’ai un peu de mal
à enchaîner les rapports à la volée. Le sélecteur se fait très ferme
sous l’orteil et le timing poignée/sélecteur est assez difficile à
trouver. Incompréhensible, sauf à se demander si la boîte n’est
finalement pas optimisée pour une utilisation en version libre, ce qui
expliquerait la difficulté à trouver le dosage parfait dans la version
castrée... Les rapports sont néanmoins très rapprochés, ce qui couplé
au gros coffre a tendance à chambouler les repères de vitesse. Pour
le reste, la partie cycle est vraiment impressionnante de facilité et
de neutralité. Le réglage des suspensions téléphone parfaitement les
imperfections de la chaussée et procure un parfait compromis
rigueur/souplesse. La selle participe au confort de l’ensemble en
offrant également un bon amortissement. Mais attention, nous parlons
ici d’une sportive de l’extrême ! Il faut donc replacer ce commentaire
dans son contexte et adapter le terme "confort" à la catégorie. Et
surtout, quel rail : impossible de mettre quoi que ce soit en défaut
sur la partie cycle. Changements d’angle à haute vitesse, accélérations
au taquet, raccords de bitumes, prise de freins tardives et sur
l’angle, rien ne vient perturber la stabilité de la ZX-10R. Un regard,
et l’ensemble se place immédiatement sans aucune difficulté. Même le
gros Dunlop D 208 arrière de 190 ne semble pas affecter la maniabilité.
Le prix à payer - car il y’en
a un -, c’est cette sensation de toujours pouvoir faire plus vite, plus
fort, plus beau, qui pousse irrémédiablement à rouler beaucoup trop
vite sur la route. Un conseil : ne regardez jamais le compteur car il y
a vraiment moyen de se faire une énorme frayeur en réalisant à quelle
vitesse on se laisse embarquer... Seul
défaut relevé, une histoire de goûts : la poignée de frein ne présente
pas un retour d’informations à la hauteur du reste et l’attaque du
levier manque de mordant malgré la présence des étriers radiaux. Sur
une moto de cette trempe, pas de durit tressée ni de maître cylindre
radial représente encore une économie de bout de chandelle
incompréhensible. Mais tempérons, car comme n’importe quelle sportive
récente, elle freine fort. Quant à l'autonomie, elle est d’environ 180
km avant l’allumage du petit voyant de réserve. Classique pour la
catégorie. La tentation était trop forte ! Impossible
de résister, il faut vraiment aller tester les capacités du joujou sur
la piste. Direction le circuit Carole, dans des conditions climatiques
optimales. En prégrille, rebelote : les regards se fixent sur l’engin.
Grosse pression sur le pilote, qui va devoir être à la hauteur de sa
monture... Précisons
que je n’ai jamais roulé sur une moto pareille, plus habitué que je
suis aux 50 chevaux et à la partie cycle hors d’age du SZR monocylindre
du Team Moto-Net (lire notre dossier spécial).
Petite expérience de la piste, aucune de l’architecture moteur : les
meilleures conditions sont réunies pour juger de la facilité de prise
en main de l'engin ! Dès les
premiers tours, tout s’éclaire : mon mètre soixante-quinze s’intègre
parfaitement dans le triangle selle/repose-pieds/bracelets, le
réservoir reçoit l’appui de la jambe et du bras extérieurs et le
déhanché se fait naturellement.