[Essai net] triumph tiger

Pas à dire, la Tiger 2007 n’a plus grand-chose à voir avec sa devancière. Les Tiger "ancienne génération" appartenaient clairement à la famille Trail, peut-on en dire autant de l’actuelle?
La Tiger "tigrée" arborait le style baroudeur qui sied au genre: haute sur pattes, longue selle, large porte-paquets, tête de fourche, soufflets de fourche, protection des mains, roues à rayons, jante de 19 à l’avant, large réservoir de 24 litres, longs débattements de suspensions. Nous avons beau détailler la bête, difficile, hormis le nom et le nombre de cylindres, de trouver beaucoup de points communs entre l’ancienne et la nouvelle Tiger.
Pas de regrets pourtant, la nouvelle Tiger arbore une robe plutôt sexy et très contemporaine.
Du neuf à tous les étages
Exit le cadre acier qui laisse place à un cadre en alu, très inspiré de celui de la Speed Triple, exit aussi les suspensions à grand débattement: 150mm à l’arrière (on vient de 200), 150 aussi à l’avant (20 en moins!) dorénavant offerts par une robuste fourche inversée de 43mm totalement réglable. Roues à bâtons de 17 à l’avant et à l’arrière, montées respectivement en 180/55-17 et 120/70-17: ça sent le bitume plus que la caillasse! La ligne amincie abandonne 4 litres de contenance, exit le porte paquet qui ne trouve plus sa place sur une poupe effilée. Pas besoin de vous faire un dessin, la Tiger chasse dorénavant sur d’autres terres, et rejoint dans l’esprit des motos comme la Multistrada, pour ne citer qu’elle. Pour autant, la Tiger ne nie pas tout son héritage: la selle, presque aussi haute qu’avant, a gardé une longueur et un moelleux des plus accueillants, le large guidon induit une position décontractée, très "trail" d’esprit, le gabarit peut en intimider plus d’un.
Triple!
Pour peu que vous fassiez l’impasse sur les maigres probabilités que vous avez de vous éloigner du bitume, vous trouverez votre bonheur dans la Tiger. Son époustouflant moteur a sans doute perdu un peu de patate par rapport à une Speed Triple, mais honnêtement, il reste bien assez de canassons pour se faire plaisir. Difficile de ne pas se répéter au fil des rencontres avec les 3 cylindres de Hinckley, mais ce moteur possède tant de qualités qu’on s’étonne de ne pas retrouver plus souvent cette définition chez d’autres constructeurs. Et comme chaque fois, vous lirez qu’il possède le caractère et le couple des bicylindres, avec l’allonge et la puissance des quatre pattes. C’est bien simple, ça pousse tout le temps ! Incapable de descendre aussi bas dans les tours qu’un moelleux quatre cylindre capable de ronronner depuis le ralenti, il clame sa vigueur sans retenue dès 3000 tours jusqu’au rupteur, sans faiblir un seul instant. Quel régal, quel agrément.
Too much?
La moto reprend avec vigueur à tous les régimes, et ne s’essouffle à aucun moment, propulsant la Tiger à plus de 220 km/h réels sans faiblir. C’est tellement bon que c’en est presque "too much". Difficile de rester sage à son guidon, tant l’envie est grande de sentir ce moulin prendre ses tours avec autant d’enthousiasme et de santé. Résultat: ça va vite, souvent trop vite! Et ce n’est pas le châssis qui refroidira les ardeurs. Certes, une Tiger n’est pas un vélo, tant s'en faut avec 198 kilos à sec, mais nous retrouvons un comportement à mettre en parallèle avec (une fois encore!) une Multistrada, ou tout simplement une Speed, pour rester dans la famille. Avec un plus, malgré tout: une position de conduite confortable, même si la protection du pilote reste perfectible (bon d’accord, on ne s’est pas vraiment traîné lors de cet essai, parcouru principalement en Allemagne, au vu des moyennes atteintes…). Excellent confort des suspensions, qui ne sacrifient en ien à la précision de conduite. De tels châssis avec de tels moteurs, on en redemande!
Des défauts?
Dans ce tableau idyllique, le freinage dénote un peu. Le frein arrière très puissant bloque invariablement à chaque freinage un peu appuyé. Les freins avant, carrément impressionnants avec leurs étriers radiaux Nissin à 4 pistons pinçant deux disques de 320mm déçoivent pourtant, avec une commande désagréable et un relatif manque de mordant. Ça freine, certes, et même pas mal, mais on a vu déjà beaucoup mieux comme feeling. Du point de vue dynamique, on ne voit pas trop ce qu’on pourrait reprocher d’autre à la Tiger. Et encore, ce n’est pas pour autant qu’elle ne freine pas. Ça se situe plus au niveau du ressenti que de l’efficacité. La Tiger se rattrape par ailleurs en offrant l’ABS dont il ne faut surtout pas se priver, vu la vigueur du frein arrière.
Presque parfaite
Les autres reproches que nous pourrions formuler à l’encontre de la Tiger ne sont que peccadilles, comme ce guidon, vraiment "cheap", et dont on a suppose qu’il sort d’un vieux stock racheté par John Bloor en même temps que la marque "Triumph".
Non, en finale, ce que nous reprochons le plus à la Tiger, c’est d’avoir abandonné les aspects pratiques propres à son aînée. Fallait-il, sous couvert d’efficacité routière et de plaisir de conduite, sacrifier le porte-paquet, même pas remplacé par des crochets, le warning, pourtant bien utile pour se signaler dans les embouteillages? Faut-il à chaque fois lâcher le guidon pour glaner une info sur l’ordinateur de bord, ou se tartiner les mains des projections de la chaîne? Le sans faute n’était pourtant pas inaccessible, d’autant que le prix, 10.520 euros (11.390 avec ABS) reste très compétitif face à la concurrence, hormis peut être la DL 1000 Suzuki, mais jouent elles dans la même cour? Non, le pire défaut de la Tiger, c’est sans doute d’être trop excitante J! C’est moche hein?

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